CartNat : Une Cartographie du gradient de naturalité potentielle de France métropolitaine

CartNat : Une Cartographie du gradient de naturalité potentielle de France métropolitaine

Le projet

Le projet CartNat vise à développer une méthode de cartographie de la naturalité potentielle. Ces travaux ont abouti en 2021 pour la France métropolitaine terrestre et les cartographies produites consistent en 4 couches spatiales :

  1. L’intĂ©gritĂ© biophysique de l’occupation du sol
  2. La spontanéité des processus
  3. Les continuités spatiales
  4. La carte synthétique du gradient de naturalité potentielle à partir des critÚres 1 à 3
 
Les cartographies sont aujourd’hui mises Ă  disposition (format ESRI Geodatabase – 2.3 GB) et la notice technique qui les accompagne dĂ©crit la mĂ©thodologie appliquĂ©e.

Ses auteurs

Le projet a Ă©tĂ© financĂ© par le ComitĂ© français de l’UICN, le WWF et WildEurope Initiative. CoordonnĂ© par le Groupe de travail Wilderness et Nature fĂ©rale depuis 2018, il s’agit du fruit du travail des chercheurs Adrien GuettĂ©, Jonathan Carruthers-Jones et Steve Carver qui ont bĂ©nĂ©ficiĂ© de l’aide de diffĂ©rents experts.

Pour quels usages

Il s’agit d’un outil d’aide Ă  la dĂ©cision, mis Ă  disposition dans la “BoĂźte Ă  outils” de la StratĂ©gie Nationale pour les Aires ProtĂ©gĂ©es 2020-2030 par l’Office Français de la BiodiversitĂ©, Ă  destination des Collectifs territoriaux, et dĂ©clinable aux Ă©chelles nationale, rĂ©gionale et dĂ©partementale.

3% des forĂȘts françaises ne sont plus exploitĂ©es depuis au moins 50 ans (Sources : Thompson et al 2021 et INRAE)

3% des forĂȘts françaises ne sont plus exploitĂ©es depuis au moins 50 ans (Sources : Thompson et al 2021 et INRAE)

Article de l’INRAE « 3% des forĂȘts françaises ne sont plus exploitĂ©es depuis au moins 50 ans » (16/12/2021) :

On considĂšre que les forĂȘts primaires, qui n’auraient jamais Ă©tĂ© exploitĂ©es par l’homme, n’existent plus en France mĂ©tropolitaine. Il reste cependant des forĂȘts qui ont Ă©tĂ© exploitĂ©es par le passĂ© mais qui ne le sont plus depuis un certain laps de temps et que l’on dit en libre Ă©volution. Lorsque ce temps est long Ă  l’échelle d’une vie humaine, par exemple 50 ans, les marques de l’exploitation s’estompent pour laisser place Ă  une dynamique naturelle. On peut alors qualifier ces forĂȘts de « surmatures » vis-Ă -vis du cycle sylvicole classique, bien que la maturitĂ© biologique de la forĂȘt ne soit pas encore atteinte.

Publié le 16 décembre 2021

Ces forĂȘts ont un intĂ©rĂȘt pour la biodiversitĂ© et le stockage de carbone, mais leur surface et leur rĂ©partition est trĂšs mal connue pour la France mĂ©tropolitaine. En utilisant des donnĂ©es issues d’un rĂ©seau national de mesures forestiĂšre dans les rĂ©serves naturelles et biologiques,  l’étude de Lucie Thompson et des collĂšgues du LESSEM ainsi que des rĂ©serves naturelles de France, publiĂ©e en dĂ©cembre dans le journal Diversity and Distributions, nous a permis d’exprimer la date de derniĂšre exploitation forestiĂšre en fonction des caractĂ©ristiques des forĂȘts. Une fois ce modĂšle construit, nous l’avons projetĂ© sur les donnĂ©es de l’inventaire forestier national qui dĂ©crit, de maniĂšre statistique, l’ensemble des forĂȘts françaises. Cette approche est originale car, habituellement, ce sont les caractĂ©ristiques des forĂȘts qui sont Ă©tudiĂ©es en fonction de la date de derniĂšre exploitation, et non l’inverse. Cela permet une approche continue qui s’affranchit des dĂ©bats sur le temps nĂ©cessaire Ă  la forĂȘt pour regagner son caractĂšre naturel.

Les Ă©lĂ©ments qui caractĂ©risent les forĂȘts surmatures sont les trĂšs gros arbres, de forts volumes de bois mort et la diversitĂ© en microhabitats (comme les cavitĂ©s, Ă©corces dĂ©collĂ©es
). De plus, l’absence de souches, mais aussi une forte densitĂ© d’arbres en taillis indiquent des forĂȘts sans exploitation depuis plusieurs dizaines d’annĂ©es tout en caractĂ©risant l’hĂ©ritage du passĂ© d’exploitation de la forĂȘt et une empreinte humaine toujours forte.

Ainsi, nous avons montrĂ© qu’actuellement 3% des forĂȘts françaises ne sont plus exploitĂ©es depuis au moins 50 ans (ce chiffre varie de 1 Ă  9%). C’est la premiĂšre estimation robuste – statistique – de cette proportion : la prĂ©cĂ©dente remontait aux annĂ©es 90 et Ă©tait basĂ©e sur du dire d’expert. Ces forĂȘts sont majoritairement situĂ©es en zones montagneuses, peu accessibles, mais l’on en trouve encore en plaine. Plus surprenant, notre approche a aussi permis de montrer que 43% des forĂȘts françaises n’avaient plus Ă©tĂ© exploitĂ©es depuis au moins 26 ans (et jusqu’à 50 ans), ce qui reprĂ©sente un potentiel de forĂȘts surmatures dans un futur plus ou moins proche.

Cependant, ces forĂȘts n’ont pour la plupart pas de statut de protection pĂ©renne, bien que leur conservation soit cruciale pour la biodiversitĂ© et le climat. D’autre part, des approches plus ciblĂ©es sont nĂ©cessaires pour confirmer l’approche nationale, qui reste statistique et ne couvre sans doute pas toutes les forĂȘts intĂ©ressantes pour la conservation. Ainsi, notre Ă©tude ne constitue qu’un des premiers jalons pour la cartographie et la conservation des forĂȘts surmatures et en libre Ă©volution en France mĂ©tropolitaine. Elle vient alimenter le Plan National d’Action en cours d’écriture par le ministĂšre en charge de l’écologie, et serat complĂ©tĂ©e par des travaux en cours sur la cartographie des forĂȘts surmatures en utilisant notamment la technilogie Lidar aĂ©roportĂ©.

Référence : Thompson, L., Cateau, E., Debaive, N., Bray, F., Torre, A., Vallet, P., & Paillet, Y. (2021).
How much does it take to be old? Modelling the time since the last harvesting to infer the distribution of overmature forests in France. Diversity and Distributions, 00, 1–14. https://doi. org/10.1111/ddi.13436

Lien vers la publication :
https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/ddi.13436

On finit par croire que la forĂȘt a besoin d’ĂȘtre exploitĂ©e pour ĂȘtre en pleine santĂ©

On finit par croire que la forĂȘt a besoin d’ĂȘtre exploitĂ©e pour ĂȘtre en pleine santĂ©

Baptiste Morizot, Gilles Clément, Francis Hallé

L’« Appel pour des forĂȘts vivantes », qui lance, les 16 et 17 octobre, une annĂ©e de mobilisation en France, est le signe d’une rĂ©appropriation citoyenne face Ă  la foresterie industrielle, se rĂ©jouissent plusieurs personnalitĂ©s, dont le philosophe Baptiste Morizot, le paysagiste Gilles ClĂ©ment et le botaniste Francis HallĂ©.

Le 2 aoĂ»t paraissait, dans plusieurs mĂ©dias, l’« Appel pour des forĂȘts vivantes », qui propose d’engager, dĂšs maintenant, une annĂ©e de mobilisation pour les forĂȘts françaises. Cet appel rĂ©unit une multiplicitĂ© d’acteurs et de rapports Ă  la forĂȘt, contre un adversaire commun : la malforestation des foresteries industrielles. On trouve, dans cet appel, des collectifs citoyens, des exploitants forestiers alternatifs, des associations, des habitantes et habitants, des collectifs militants, des fonctionnaires de l’Office national des forĂȘts (ONF) qui refusent le productivisme. Des gens pour qui une forĂȘt, et la maniĂšre dont elle est traitĂ©e, cela importe.

L’« Appel pour des forĂȘts vivantes » Ă©mane d’un mouvement encore sous-terrain mais puissant aujourd’hui : la rĂ©appropriation citoyenne du soin envers les Ă©cosystĂšmes qui nous abritent. Un « reclaim » [une rĂ©gĂ©nĂ©ration] de la dĂ©fense du tissu du vivant. Si nous soutenons cet appel, c’est parce que cette prise en charge par les citoyens signe le dĂ©but d’une mĂ©tamorphose majeure : c’est la rĂ©appropriation d’une mission qui avait Ă©tĂ© cantonnĂ©e aux Etats, enferrĂ©s dans des collusions graves avec les lobbys de la destruction. Ici, c’est chacun qui affirme qu’il est tissĂ© Ă  son milieu, qui dĂ©fend l’interdĂ©pendance entre lui et son paysage multispĂ©cifique. L’affect fondateur de ce mouvement tient en quelques mots : on ne se laissera plus confisquer le soin de nos milieux de vie − nous sommes le vivant qui se dĂ©fend.

« Sylvicultures douces »

La seconde dimension importante de cet appel est la pluralitĂ© des approches de la forĂȘt qu’il met en relation. L’alliance est ouverte Ă  une multitude d’usages et de pratiques, et ce qui l’anime, c’est d’abord de lutter contre un ennemi commun. L’adversaire de la forĂȘt, c’est la foresterie industrielle « et son monde » : c’est-Ă -dire l’extractivisme, incarnĂ© par les exploitants hĂ©ritiers de l’idĂ©ologie suivant laquelle les forĂȘts sont d’abord des rĂ©serves de matiĂšre Ă  notre disposition, des espaces de pure production dont il faut optimiser le rendement. Ce sont tous ceux qui rĂ©duisent les massifs forestiers Ă  des usines Ă  bois en Ă©puisant l’humus, en fragilisant les sols, en rĂ©duisant des milliers d’hectares de forĂȘts diversifiĂ©es Ă  des plantations monoculturelles de rĂ©sineux qui ne sont accueillantes ni pour la biodiversitĂ© ni pour les habitants. Mais toute exploitation n’est pas une destruction : il existe des formes de « sylvicultures douces » qui s’inspirent des dynamiques forestiĂšres tout en reconnaissant la valeur du bois, dans des logiques Ă©conomiques qui ne sont plus hors-sol mais reliĂ©es Ă  des enjeux sociaux et locaux, de soin envers le travail et les savoir-faire des bĂ»cherons, des forestiers et des artisans. Cette exploitation soutenable, de type « futaie jardinĂ©e », avec des arbres diversifiĂ©s en Ăąge et en essence, respectueuse des dynamiques propres Ă  la forĂȘt, est dĂ©fendue, par exemple, par la charte du RĂ©seau pour les alternatives forestiĂšres (RAF). Quelle meilleure boussole prendre, pour imaginer une gestion soutenable de la forĂȘt, que celle des puissances de vie, de rĂ©gĂ©nĂ©ration, de rĂ©silience, des Ă©cosystĂšmes forestiers tels qu’ils se dĂ©ploient depuis des millions d’annĂ©es sans forçage par l’exploitation, sans contrainte, c’est-Ă -dire en libre Ă©volution ? Il ne s’agit Ă©videmment pas d’ériger cette libre Ă©volution en norme de ce que doivent ĂȘtre l’ensemble des milieux forestiers : puisque l’on a besoin de bois, il faut bien en prĂ©lever. Mais une forĂȘt en libre Ă©volution est un tĂ©moin actif de ce que fait la vie sylvestre lorsqu’elle n’est pas mise au travail, et donc de ce que lui fait la gestion active. C’est le tĂ©moin constant et stable pour Ă©valuer la violence ou la tendresse de notre action d’exploitation sur la forĂȘt, pour la corriger, pour trouver les Ă©gards ajustĂ©s. Sans elle, on finit par prendre la forĂȘt exploitĂ©e pour modĂšle de ce qu’est une forĂȘt. On finit par croire que la forĂȘt a besoin d’ĂȘtre exploitĂ©e pour ĂȘtre en pleine santĂ©. En consĂ©quence, nous avons aussi besoin que des forĂȘts soient laissĂ©es en libre Ă©volution − certains experts forestiers proposent, par exemple, 25 % des superficies forestiĂšres.

Libre Ă©volution

Ce que nous dĂ©sirons pour l’avenir, ce sont des forĂȘts vivantes : des massifs riches d’un maillage d’usages diffĂ©renciĂ©s, allant de la sylviculture douce Ă  la forĂȘt cueillie, de la futaie jardinĂ©e jusqu’à la libre Ă©volution, la restauration Ă©cologique et des formes intelligentes de rĂ©ensauvagement. Des forĂȘts plus rĂ©silientes face aux bouleversements du climat, et qui prennent part Ă  leur attĂ©nuation. Cette alliance d’usages soutenables est un front commun contre l’extractivisme. Mais un ennemi commun ne fait pas une alliance durable − au-delĂ , qu’est-ce qui unit positivement celles et ceux qui ont rĂ©pondu Ă  cet appel ? Ce qui les rassemble, c’est probablement quelque chose comme une considĂ©ration et une confiance pour les dynamiques de la forĂȘt elle-mĂȘme, qui existe et rayonne comme Ă©cosystĂšme autonome et en transformation depuis des millions d’annĂ©es sur notre Terre, avant mĂȘme notre apparition, Ă  nous, humains. Ce front commun regroupe une alliance d’alternatives d’accompagnement des milieux forestiers dont le dĂ©nominateur commun est de chercher des Ă©gards ajustĂ©s envers les logiques intimes de la forĂȘt : d’essayer de les comprendre et de les respecter.

VoilĂ  ce que nous entendons dans cet « Appel pour des forĂȘts vivantes » : une invitation Ă  rejoindre cette alliance, en allant Ă  la rencontre de la myriade d’évĂ©nements qui vont bruisser dans les forĂȘts françaises les 16 et 17 octobre. Ce sera le lancement multiforme et joyeux de cette annĂ©e de mobilisation dont la forĂȘt française a besoin, dont nous avons besoin.

Gaëtan du Bus, forestier ; Gilles Clément, paysagiste ; Gilbert Cochet, naturaliste ; Hervé Coves, agroécologue ;
Francis Hallé, botaniste ; Béatrice Kremer-Cochet, naturaliste ; Virginie Maris, philosophe ;
Patrice Martin, garde forestier (Snupfen, ONF) ; Baptiste Morizot, philosophe ; Annik Schnitzler, Ă©cologue ;
Thierry ThĂ©venin, paysan herboriste ; Ernst ZĂŒrcher, forestier.

Animal Cross sort son reportage « Et si on laissait la nature évoluer librement ? »

Animal Cross sort son reportage « Et si on laissait la nature évoluer librement ? »

Ce film documentaire sur la libre Ă©volution  vous emmĂšnera dans les rĂ©alitĂ©s de la protection de la nature en France. Vous constaterez que la faune et la flore sauvages sont presque partout dĂ©rangĂ©s et qu’il est nĂ©cessaire de dĂ©dier des espaces Ă  la libre Ă©volution, sans interventions humaines (pas de chasse, de pĂȘche, d’exploitation forestiĂšre ou miniĂšre, d’agriculture, de pastoralisme), pour les prĂ©server. Puis vous serez plongĂ©s dans la beautĂ© d’une nature en libre Ă©volution. Vous dĂ©couvrirez tous les avantages qu’elle procure, tant pour la biodiversitĂ© que pour l’ĂȘtre humain.

Pour une forĂȘt primaire en Europe de l’Ouest – Le nouveau manifeste de Francis HallĂ©

Pour une forĂȘt primaire en Europe de l’Ouest – Le nouveau manifeste de Francis HallĂ©

Francis HallĂ© vient de publier un fabuleux manisfeste nommĂ© Pour une forĂȘt primaire en Europe de l’Ouest. Voici son rĂ©sumĂ© :

Les forĂȘts primaires, qui n’ont jamais Ă©tĂ© modifiĂ©es ni exploitĂ©es par l’homme, sont des joyaux de la nature, des sommets de biodiversitĂ©. Leurs bĂ©nĂ©fices sont inestimables. Sous les tropiques, elles subissent un dĂ©clin alarmant. En Europe, elles ont quasiment disparu depuis 1850. Pourquoi devrions-nous nous satisfaire de cette situation ? Ce n’est cohĂ©rent ni avec notre tradition culturelle, ni avec notre exigence de beautĂ© des paysages.
C’est pourquoi, Ă  l’initiative du botaniste, l’Association Francis HallĂ© pour la forĂȘt primaire agit pour la crĂ©ation d’un vaste espace (environ 70 000 hectares) dans lequel une forĂȘt, placĂ©e en “libre Ă©volution”, renouvellera et dĂ©veloppera sa faune et sa flore sans aucune intervention humaine, et cela sur une pĂ©riode de plusieurs siĂšcles. Cette zone, qui reste Ă  localiser, sera transfrontaliĂšre, avec une base française.
Ce projet suscite un trĂšs vif intĂ©rĂȘt du public, pour des raisons Ă  la fois Ă©cologiques et philosophiques. Comme l’expose ce manifeste, l’Association souhaite susciter un large mouvement d’opinion pour faciliter l’obtention des accords politiques et administratifs nĂ©cessaires. Il est urgent d’agir !

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